Victoire à Saint-Sauveur. Et maintenant : la ferme !

jeudi 14 octobre 2021

Voici le communiqué des associations P.A.R.C. et A.S.P.I. suite à la décision du Tribunal administratif à propos de Saint-Sauveur. A sa lecture, on comprend pourquoi Martine Aubry ne peut plus défendre que, malgré la décision de justice, le projet Saint-Sauveur demeure d’« intérêt général ».

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Le tribunal administratif vient d’enterrer pour un moment le projet « Saint-Sauveur ». Pour le vingtième anniversaire de Martine Aubry à la tête de la mairie de Lille, nos associations P.A.R.C. et A.S.P.I. ont remporté une victoire historique contre son projet anti-écologique. Elle est le premier coup d’arrêt significatif porté au programme, de plus en plus mortifère, d’« attractivité de la métropole », porté depuis les années 1980 par Pierre Mauroy, Euralille, la grande famille du BTP, et les agences marketing « HelloLille » et « Lille3000 ». Nous pouvons fêter cette victoire, mais nous resterons vigilants contre tout passage en force. Place maintenant à notre contre-projet de coopérative agro-culturelle, et répondons à leurs rêves de grandeur : maintenant, la ferme !

Le délibéré

Aujourd’hui 14 octobre 2021, le juge administratif a rendu son délibéré concernant nos recours. Il nous donne raison, et il donne tort à Martine Aubry qui continue de s’auto-persuader que son projet reste d’« intérêt général » tant il répondrait « aux besoins de logements et de nature » [1]. Le juge dit tout autre chose. L’étude d’impact censée évaluer les coûts et bénéfices de ce projet de 23 hectares est jugée non sincère, insuffisante, et pour tout dire : mensongère. Dès lors que les études sur la circulation routière, la pollution de l’air et de l’eau, sont faussées, comment évaluer le fameux « intérêt général » ? Tout ce que l’on peut évaluer aujourd’hui, c’est la désinvolture avec laquelle les élus et les services réalisent leurs études. Et donc le peu de considération à l’égard des habitants qu’ils convoquent pourtant dans de spectaculaires « réunions de concertation ». Tout cela est bidon !

Une victoire historique

Cette victoire est à mettre au crédit des quelques luttes écologiques victorieuses depuis cinquante ans. Née de la destruction du quartier ouvrier Saint-Sauveur et de ses monuments historiques, l’association Renaissance de Lille ancien stoppait dans les années 1970 la « Percée de la Treille », ce projet insensé d’autoroute qui devait éventrer le Vieux-Lille en passant par le Parvis de la cathédrale. C’est à l’époque aussi que des habitants du Vieux-Lille et les premiers écolos ferraillent contre le projet « Diplodocus », un monstre de béton de 75 mètres de haut. Le projet abandonné deviendra le « Nouveau Siècle ». Nous avons aussi le souvenir de l’agrandissement du stade de foot Grimonprez-Jorris arrêté par des associations, mais finalement déporté, et augmenté, à Villeneuve d’Ascq. La victoire contre la bétonisation de Saint-Sauveur montre que des habitants, qui ne sont rien mais sont obstinés, peuvent gagner. Ce doit être un message d’espoir pour les habitants d’autres quartiers confrontés à des projets similaires. Et il y en a !

Les fruits de l’attractivité

Malgré ces combats victorieux, la bétonisation / densification de Lille poursuit son rythme effréné depuis les vieilles Trente glorieuses : toujours plus de bagnoles, de routes, d’autoponts, de métros, d’avions, de trams, de bureaux, de pôles de compétitivité. Et donc : de logements. Doit-on comprendre que plus on construit, plus forte est la « pression immobilière » ? S’ils le pouvaient, les élus construiraient sur la Grand Place en pleurant sur le sort des mal logés.
Cette politique d’« attractivité » débute dans les années 1980 quand Pierre Mauroy promeut avec les milieux d’affaire la marque « Lille » (TGV, Lille 2004, Euralille), et se poursuit avec Martine Aubry (Euratechnologies, Euralille 2 et 3, Lille 3000). Mais les fruits de leur attractivité sont avariés. Lille n’apparaît dans aucun des classements – aussi critiquables soient-ils – des villes où il fait bon vivre, bon marcher, bon circuler à vélo, bon se promener dans un parc. On la retrouve plutôt dans les classements des villes polluées, bétonnées, et soumises au phénomène des « îlots de chaleur ». Depuis la rentrée 2021 et la « reprise économique », les automobilistes témoignent de l’enfer des embouteillages pour entrer et sortir de la métropole. L’attractivité, c’est donc ça : les embouteillages, les fumées, et la spéculation immobilière.

Défendons la coopérative

Le Tribunal administratif n’a pas porté un jugement politique sur le mauvais état écologique et sanitaire de Lille. Il a jugé, en droit, que l’étude d’impact sous-estime significativement les coûts écologiques et sociaux du projet Saint-Sauveur. Mais les promesses de profits sont telles, à cet endroit de la ville, que nous restons vigilant contre tout passage en force qui piétinerait cette décision de justice.
En face, notre contre-projet est moins grandiloquent, mais pensé par et pour des habitants :
 Nous défendons d’abord le principe de « Zéro construction » sur Saint-Sauveur, car même sans ce projet, Lille resterait la ville la moins verte de France.
 Ensuite, nous proposons la création d’une coopérative agricole et culturelle pour cultiver ensemble un sol, des connaissances, des savoir-faire. Au milieu d’une métropole d’un million d’habitants, voilà qui placerait Lille, pour une fois, à l’avant-garde.

Alors maintenant, sur Saint-Sauveur : la ferme !

P.A.R.C. et A.S.P.I., le 14 octobre 2021.

Notes

[1La Voix du nord, 4 octobre 2021.